LA CLAUSE RESOLUTOIRE DU BAIL COMMERCIAL MALMENEE PAR LES « ORDONNANCES COVID-19 »
Tout bail commercial est généralement assorti d’une clause résolutoire permettant au bailleur de résilier rapidement le contrat lorsque le preneur n’exécute pas ses obligations contractuelles, au premier rang desquelles le paiement du loyer et des charges.
L’ordonnance N°2020-316 du 25 mars 2020 prise en application de la loi N°2020-290 du 23 mars 2020 proclamant l’état d’urgence sanitaire, est pourtant venue neutraliser l’utilisation de cette disposition contractuelle.
Cette ordonnance relative au paiement des loyers, des factures d'eau, de gaz et d'électricité afférents aux locaux professionnels des entreprises dont l'activité est affectée par la propagation de l'épidémie de covid-19 a institué un dispositif très protecteur du preneur à bail commercial qui ne s’acquitterait pas du paiement de son loyer.
Ainsi, les entreprises susceptibles de bénéficier du fonds de solidarité ne pourront « encourir de pénalités financières ou intérêts de retard, de dommages-intérêts, d'astreinte, d'exécution de clause résolutoire, de clause pénale ou de toute clause prévoyant une déchéance, ou d'activation des garanties ou cautions, en raison du défaut de paiement de loyers ou de charges locatives afférents à leurs locaux professionnels et commerciaux, nonobstant toute stipulation contractuelle et les dispositions des articles L. 622-14 et L. 641-12 du code de commerce ».
Ces dispositions sont applicables aux loyers et charges locatives exigibles entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai de deux mois après la fin de l’état d’urgence sanitaire, laquelle a été fixée au 10 juillet 2020.
Les loyers et charges concernés par le dispositif sont ceux dont l’échéance de paiement est intervenue entre le 12 mars et le 10 septembre 2020.
Le preneur, susceptible de bénéficier du fonds de solidarité, qui n’aurait pas procédé au paiement du loyer et/ou des charges locatives exigibles durant cette période de 6 mois, se trouve préservé définitivement de toute mise en œuvre de la clause résolutoire prévu par le contrat de bail.
Ce texte ne prévoit pas en revanche l’annulation pure et simple de la dette locative : le loyer et les charges demeurent exigibles. L’ordonnance n’interdit pas au bailleur de demander, y compris devant un tribunal, le paiement du loyer, sans toutefois pouvoir actionner la clause résolutoire.
A ce jour, il est trop tôt pour connaître la réaction judiciaire ; mais on peut penser que le preneur justifiant de difficultés et proposant un plan sérieux d’apurement de sa dette locative pourra obtenir des délais de paiement pour s’en acquitter.
Reste que les loyers exigibles depuis le 11 septembre 2020 ne sont pas couverts par la protection sus-visée de sorte que pour ceux-là le bailleur pourra théoriquement délivrer un commandement avec rappel de la clause résolutoire et, éventuellement, faire constater la résiliation judiciaire du bail. Dans cette hypothèse encore, on peut légitimement penser que le juge des référés pourrait suspendre les effets de la clause résolutoire et accorder au preneur des délais pour s’acquitter de sa dette.
Durant plusieurs mois encore, les bailleurs demeureront victimes des effets de la crise sanitaire …
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